Averroès

Il est considéré comme le principal philosophe musulman de l'Occident (comme Avicenne fut le principal philosophe musulman de l'Orient). Si la tradition musulmane rejette parfois les philosophes, Averroès, en revanche, tenta toute sa vie de montrer la complémentarité entre la philosophie et la religion, la philosophie étant pour lui uniquement celle d'Aristote.

Sommaire

Les sources de sa pensée.

La vie d'Averroès

Apport conceptuel.

Principales œuvres.

Les sources de sa pensée.

Aristote est pour lui le philosophe qu'il s'agit de retrouver dans sa pureté. L'autre source est évidemment l'Islam et donc le Coran.

La vie d'Averroès

Ibn Rushd (c'est l'occident qui lui donnera le nom d'Averroès lorsque ses œuvres seront traduites en latin) naît à Cordoue en 1126 (520 de l'hégire). Cette ville est alors un lieu d'intense activité intellectuelle. Son grand-père était un juriste célèbre. Son père, juge à Cordoue, lui enseigne la jurisprudence musulmane. Il suit des études de philosophie, de théologie, de mathématiques sous la direction du philosophe arabe Ibn Tufayl et de médecine sous celle du médecin Avenzoar. C'est au double titre de médecin et de juriste qu'il exercera sa carrière officielle. Vers 1166 il compose un grand traité médical (Généralités). En 1169 (565), il devient cadi (haut magistrat chargé de dire le droit) à Séville, peu de temps après avoir été présenté à l'émir Yùsuf, calife du Maroc et de l'Espagne musulmane. Celui-ci lui demande de commenter les ouvrages d'Aristote. Pendant vingt ans, Averroès écrira sur la quasi-totalité des traités d'Aristote. Vers 1171 (567), il revient à Cordoue comme grand cadi puis, en 1182 (578), il devient à Marrakech le médecin de Yùsuf. Il remplira les mêmes fonctions auprès du successeur de l'émir. Attaqué par les partisans de l'orthodoxie religieuse étroite, il tombe en disgrâce vers 1195 ( 592). Il connut un retour en grâce peu avant sa mort survenue en 1198 (595).

Apport conceptuel.

Averroès est  " Le commentateur d'Aristote ", comme le penseront les latins. Il respecte scrupuleusement l'œuvre de cet auteur qu'il considèrera comme un " être divin " et inspiré. Il le commente, suivant le texte pas à pas, formule les problèmes que suscitent certains passages, rapporte les solutions avancées par les commentateurs antérieurs et expose la sienne. Aux yeux d'Averroès, rien dans la philosophie d'Aristote bien comprise ne contredit le Coran. La philosophie ne contredit pas la loi divine qui appelle à étudier rationnellement les choses : on doit unir le rationnel et le traditionnel. Philosophie et religion doivent être maintenues chacune dans leur sphère, ce qui est la condition de leur accord. La loi divine a, à la fois, un sens extérieur et un sens intérieur : les hommes capables de science doivent pénétrer jusqu'à ce sens intérieur et le garder pour eux. Les autres se contentent du sens extérieur qui, du reste, leur est destiné.
Les arguments se divisent en trois classes :

  • les arguments d'exhortation ou oratoires convenant aux hommes simplement influencés par les mots ;
  • les arguments théologiques convenant aux hommes capables d'interpréter ;
  • les arguments savants pratiqués par les hommes capables d'interprétation certaine et de démonstration c'est-à-dire les philosophes.

Pour rendre le Coran accessible, Dieu l'a communiqué sous forme d'exhortations mais il peut être interprété et argumenté et les démonstrations de la philosophie ne le contredisent pas.
Ainsi, si les préceptes pratiques s'imposent à tous indistinctement, les comportements doivent différer en matière théorique. Il n'est rien de pire que de communiquer aux gens simples des interprétations seulement probables, mal fondées, qui jettent le trouble dans les esprits ainsi que le font les théologiens. Il faut donc substituer aux formulations et arguments des écoles théologiques un exposé, fondé sur le Coran, convenant à la fois aux hommes simples et aux savants.
Par exemple, le Coran semble suggérer que Dieu a un corps. Si on suggère que Dieu n'a pas de corps, on risque de troubler l'homme du commun qui en conclura peut-être que Dieu n'existe pas. Il faut s'en tenir à la Loi, n'affirmer ni la corporéité, ni l'incorporéité de Dieu. En disant que Dieu est lumière, on ne s'écarte ni du Coran ni de la tradition des Prophètes mais on suggère à l'homme simple l'idée d'une existence réelle et noble et aux savants l'idée que leur intelligence est incapable de saisir Dieu.
On voit donc qu'Averroès refuse la tradition théologique musulmane mais accepte intégralement la révélation coranique et la philosophie d'Aristote comme étant les deux expressions différentes de la vérité. La raison ne peut tout saisir de la révélation.
Le monde n'a ni commencement ni fin temporels. Les sphères tournent éternellement grâce à l'activité éternelle du Premier Agent (le moteur non mu d'Aristote). Le Dieu aristotélicien est volonté. Sa science n'est pas universelle (car elle serait abstraction) ni particulière (car le particulier est multiple quand l'intellect divin se caractérise par son unité). La science divine est la cause et non l'effet de la création. Pour Dieu, connaître et créer constituent le même acte. Autant dire que la science divine est très différente de la nôtre.
Il existe une intelligence séparée (l'intellect agent), la même pour tous les hommes, qui meut l'intellect matériel. Ces deux intellects sont éternels et il y a donc une immortalité de l'intelligence. Ainsi si des individus meurent, d'autres les remplacent. Si l'intelligence vient à manquer dans un point de la terre, elle existe en quelque autre. Il n'en est pas de même de chaque homme pris isolément. Cela explique que les pensées des hommes sont différentes les unes des autres et il dépend de moi de me joindre ou non à l'intellect agent. L'imagination, liée au corps, est périssable et meurt avec lui. Faut-il en conclure que l'âme est mortelle ? Le problème reste ouvert.
Nous devons nous joindre à l'intellect agent. Les substances séparées (dont l'intellect agent) sont connaissables quoique difficilement. La " jonction " nous unit alors à l'intelligible pur, ce qui nous procure la " béatitude ". Se joindre à l'intellect agent, c'est accéder au niveau de l'intelligible pur. La béatitude se situe donc dans la perfection du savoir. La béatitude est accroissement du savoir.

Les principales œuvres.

  • Commentaire sur la métaphysique d'Aristote
  • Traité décisif sur l'accord de la religion et de la philosophie
  • Découverte des méthodes démonstratives concernant les dogmes religieux (1189/585)

Index des auteurs